Si la victoire d’Alison Jackson chez les femmes, hier, était une surprise, celle de Mathieu Van der Poel aujourd’hui est tout, sauf inattendue. Le duel Van Aert -Van der Poel a bien eu lieu mais le Néerlandais a su éviter les chutes et les crevaisons pour s’imposer en solitaire. Les Olympistes vont résument l’Enfer du Nord 2023.
La reine des classiques a un nouveau roi : Mathieu Van der Poel. Auteur d’un début de saison stratosphérique avec un titre de champion du monde de cyclo- cross, une victoire sur Milan San Remo et une 2ème place sur le Tour des Flandres, il était l’un des plus grands favoris. Mais Paris Roubaix est une course à part. La preuve en est, il est seulement le 4ème coureur après Degenkolb (2015), Kelly (1986) et Van Hauwaert (1908) a réaliser le doublé San Remo-Roubaix. Récit d’un exploit.
Les hostilités lancées de très loin par la Jumbo Visma
Kilomètre 154, secteur Havely à Wallers. Non, vous ne rêvez pas. Wout Van Aert accélère dans l’un des plus difficiles secteurs de Paris Roubaix, classé 4 étoiles. Il emmène alors avec lui John Degenkolb, le leader de la DSM, son coéquipier Christophe Laporte, Van der Poel et le Suisse Stephan Kung. Ces cinq hommes partent à la poursuite des échappés. La tactique Jumbo Visma est lancée. Van Aert, avec un équipier de luxe pour le secourir, est sur orbite.
Mais au kilomètre 167, dans le mythique secteur Arenberg (5 étoiles) et ses pavés acérés, le plan de la Jumbo vol en éclat. Alors que Jasper Philipsen, équipier de Mathieu Van der Poel, Ganna (Ineos Grenadier) et Pederson (Trek) viennent de les rejoindre, à l’arrière, une chute fait tomber le tenant du titre Van Baarl et équipier de Van Aert. Mais la malchance ne s’arrête pas là, Christophe Laporte crève à la sortie et perd alors 40s. Il ne reviendra pas. Désormais, le Belge est esseulé et le Néerlandais entouré.

Le tant attendu duel Van der Poel – Van Aert
Kilomètre 206, secteur Auchy lez Orchies à Bersée (4 étoiles). Mathieu Van der Poel décide de passer à l’offensive et seul John Degenkolb arrive à suivre, Van Aert est décroché. Mais le groupe se reforme avant le secteur de Mons en Pévèle ( 5 étoiles) . Le Néerlandais tente encore une fois dans ce secteur mais ne fait pas la différence. Son offensive la plus tranchante est à la sortie du secteur où un faut plat montant lui est favorable. Seul Van Art arrive à le suivre. Mais ce dernier refuse de prendre le relais et le groupe se reforme. Tout reste à faire pour ces sept hommes. Mais une chose est sûr le vainqueur de la reine des classiques est parmi eux.
Marche ou crève
Kilomètre 241, carrefour de l’Arbre (5 étoiles). La légende dit que celui qui sort en premier de ce secteur gagne la course. Philipsen mène un tempo d’enfer pour son coéquipier. La tension est palpable. Dekenkolb derrière Philipsen se décale sur la droite, Van Der poel, 3ème à ce moment-là, se faufile. Et sur ces secteurs aussi étroits, le vainqueur de Paris Roubaix 2015 chute et voit la chance de victoire s’envoler.
« C’est évidemment une grande déception… C’est vraiment décevant d’être privé de cette chance d’obtenir un très bon résultat. Je n’étais certainement pas le plus fort dans ce groupe, mais Roubaix est Roubaix et tout peut arriver lorsque vous êtes dans ce groupe, si près du but »
Dekenkolb, vainqueur de Paris Roubaix 2015
Wout Van Art profite de ce fait de course pour porter son accélération. En deux temps, le petit-fils de Raymond Poulidor le rattrape et porte à son tour son attaque. La bataille fait rage entre les deux meilleurs ennemis. A ce moment-là, on se dit que cette course va tomber dans l’irrationnel pendant ces 15 derniers kilomètres. Mais Van Aert, malchanceux – comme toute son équipe depuis le début de la journée – crève et Mathieu s’envole vers la victoire.
La consécration pour Van der Poel

Kilomètre 257, vélodrome de Roubaix. Les supporters belges, venus en nombre assister à l’arrivée, ne peuvent que l’acclamer malgré leur pointe d’amertume. Ça y est, Mathieu Van der Poel l’a fait. Pour sa 3ème participation, le Néerlandais lève les bras et remporte son premier Paris Roubaix avec un rythme effréné à plus de 46km/h de moyenne (record de l’épreuve). Mais la fête n’est pas finie chez les Alpecin Deceunick. Son coéquipier Philipsen a tenu Van Aert pendant les 15 derniers kilomètres et remporte le sprint. Avec sa 2ème place, les Alpecin-Deceunick signent un doublé historique et montrent leur domination face à la Jumbo Visma de Van Aert, Van Baarle et Laporte, sur ce Paris Roubaix 2023.
« C’est toujours difficile d’accepter ce qu’il s’est passé dans la course. C’est un Paris-Roubaix classique, ce n’est pas fini tant que vous n’êtes pas au vélodrome. »
Van Aert, 2ème l’année dernière a manqué d’ajouter un 2ème monument à son palmarès après Milan San Remo 2020
Son meilleur ennemi sait que le facteur chance est important sur Paris Roubaix mais il n’a cessé de l’harceler pendant toute la course pour remporter son 3ème monument , 3 semaines après Milan San Remo. MVDP est seul à réaliser, a minima, un podium sur les trois premiers monuments de la saison. En un mot, monumental.