Arrivé en 2010 aux Iles Canaries pour jouer au basket alors qu’il n’avait que 16 ans, Petit Niang, de son vrai nom, Mamadou Nidaye Niang, est aujourd’hui encore au pays de Cervantes, à Grenade. Autour d’un café con leche et d’un colacao, ce dernier nous raconte son parcours qui l’a amené de son village sénégalais de Medina Sabakh à la terre andalouse.
C’est au bar Casa Isla, à 100 mètres du Palacio Municipal de Deportes de Granada que l’on retrouve ce Sénégalais de 2 mètres 10 qui, une chose est sûre, ne passe pas inaperçu auprès des passants. Alors que les dernières lueurs du soleil s’estompent derrière la Sierra Nevada, la température est encore agréable en terrasse pour un mois de janvier. Pourtant, malgré les 15 degrés affichés au compteur, le pivot du Fundacion CB Granada avoue qu’il fait « vraiment froid » ! Il faut dire que, depuis 2010, ce dernier a été habitué à la chaleur des iles espagnoles avec ses passages à Gran Canaria et Tenerife. Une douce fraicheur grenadine à laquelle le joueur sénégalais a encore du mal à s’acclimater.
Découverte du basket à seulement 14 ans
C’est à Thiès (dans l’Ouest du Sénégal) que Mamadou Ndiaye Niang foule pour la première fois un parquet à seulement 14 ans. « Pendant les vacances, j’allais à Thiès chez ma grand-mère. Elle voulait que j’aille au Centre Académique de Basket de la ville car elle était persuadée que je pouvais être bon avec ma taille. Sans elle, je ne serais jamais devenu basketteur ». Très vite, Petit Niang fait ses preuves et deux ans plus tard, le club de CB Gran Canaria lui propose un essai de 15 jours.

Désireux d’avoir un avenir meilleur, le jeune homme accepte la proposition malgré les réticences de sa famille. « Au début ma famille n’était pas d’accord pour que je quitte le Sénégal. Dans notre pays, qui est à majorité musulmane, beaucoup de gens pensent que quand tu pars en Europe, tu y vas pour boire, pour fumer de la drogue … Mais j’ai été clair avec mes parents : je sais ce que je veux. Si je souhaite aller en Europe c’est pour avoir une vie meilleure et non pour boire de l’alcool ! ».
C’est ainsi qu’en 2010, accompagné d’un ami sénégalais, Petit Niang s’envole vers une nouvelle vie pour l’archipel des Canaries avec la ferme détermination de réussir. Bingo, quinze jours plus tard, le jeune pivot s’engage avec le club du CB Gran Canaria. Néanmoins, tout n’a pas été rose à son arrivée : « Quand je suis arrivé à Gran Canaria au début c’était très difficile. Quand tu changes de culture, de pays à seulement 16 ans et que tu es loin de ta famille, ce n’est pas toujours évident. Le système de jeu espagnol était aussi plus exigeant avec plus d’entrainements qu’au Sénégal, donc j’ai dû m’adapter rapidement », explique-t-il.
Une peur panique de l’avion
Trois ans plus tard, le joueur de 2 mètres 10, qui n’a rien de « Petit » comme pourrait le prétendre son prénom, quitte l’ile des Canaries pour rejoindre Tenerife et s’engage avec le club de l’Iberostar Tenerife, club de Liga ACB (première division espagnole de basket). Pendant six ans, le pivot aussi grand que le volcan Teide de Tenerife, se plaira dans ce doux archipel des Canaries où il y vivra ses plus belles émotions avec notamment une victoire en Basketball Champions League en 2017.
« Tenerife restera à jamais le meilleur club de ma vie car les gens étaient vraiment sympas avec moi et m’avaient adopté, ils m’aimaient beaucoup. On me reconnaissait même dans la rue ! ».
Pourtant, l’histoire s’arrête brutalement en 2019 alors qu’il lui reste deux ans de contrat. La raison ? Une peur panique de l’avion qui lui infligeait une grande dose de stress avant chaque match. « Je craignais tellement l’avion que je ne voulais plus rester au club. Tenerife étant sur une ile nous devions prendre l’avion chaque week-end pour parcourir l’Espagne et l’Europe. C’était très difficile car trois jours avant chaque rencontre, j’étais davantage angoissé pour prendre l’avion que pour jouer le match. Cela m’usait beaucoup d’énergie ». Effrayé, il rejoint donc le continent pour échapper à cette pression et s’engage avec le Real Betis pour deux saisons.
Construction d’un centre de basket à Medina Sabakh
Aujourd’hui, Mamadou Nidaye Niang, grand fan de Lebron James, a déposé ses valises depuis septembre au Sud-Est de l’Andalousie, à Grenade, club de deuxième division espagnole (Liga LEB Oro), pour un an. Pourtant, après deux années sévillanes peu concluantes, le Sénégalais voulait rejoindre la France pour rejoindre sa femme qui travaillait à Paris. « J’ai eu plusieurs offres de Pro B notamment du LMB (Lille Métropole Basket). Mais avec le club on ne s’est pas mis d’accord sur le contrat et cela ne s’est pas fait. L’année prochaine, je pense retenter ma chance en France pour que ma femme puisse elle aussi vivre ses rêves », confie-t-il.
Si par moment, la Teranga lui manque, cette terre d’hospitalité et de partage qui caractérise si bien le Sénégal, pour rien au monde le joueur de Grenade ne regrette son aventure espagnole. « J’ai souffert mais je ne peux que remercier le sport car grâce à lui j’ai pu faire quelque chose de ma vie et surtout aider ma famille. Aujourd’hui, d’une certaine manière, c’est moi qui maintiens la famille au pays et j’en suis fier », avoue-t-il tout en sirotant son café con leche, cette boisson au café courante dans toute l’Espagne, composée de café fort mélangé à du lait. Car comme le café con leche, Petit Niang se caractérise à la fois par cette force de caractère qui l’a amenée au plus haut niveau mais aussi par cette générosité et cette gentillesse pour aider à tout prix sa famille et notamment son petit frère, Madiaw Niang, parti jouer dans une faculté américaine.

Désormais, le pivot Sénégalais veut regarder vers l’avenir. Des projets ? Il en a. « D’ici deux, trois ans, j’aimerais investir au Sénégal et notamment construire un centre de basket dans mon village (Medina Sbakh) car tout comme moi il y a aussi des jeunes qui sont très grands et qui auraient toutes les qualités pour jouer dans un championnat européen. Je voudrais les aider à réaliser leurs rêves ». Alors que le soleil s’éteint peu à peu sur la cité grenadine et laisse place à la fraicheur de la nuit espagnole, Petit Niang nous laisse avec ses rêves pleins la tête. Hasta Luego chico !