Tennis

L’Italie, le nouvel empire du tennis mondial

Deux millénaires après la gloire de l’Empire romain, l’Italie brille de nouveau sur la scène internationale. Oubliez les champs de batailles et les guerres, c’est désormais sur les courts de tennis que Rome renaît. Avec 10 Italiens dans le TOP 100 au classement ATP, le tennis italien se pose désormais comme le nouvel empereur de la balle jaune. Explications.

« Nous sommes en 50 avant Jésus-Christ. Toute la Gaule est occupée par les Romains… Toute ? Non ! Car un village peuplé d’irréductibles Gaulois résiste à l’envahisseur grâce à la potion magique de Panoramix ». Une chose est sûre, le tennis tricolore aurait bien besoin de trouver cette fameuse potion magique que le tennis italien lui, semble enfin avoir trouvé. Avec 5 italiens (Cecchinato, Berrettini, Sinner, Musetti et Fognini) au troisième tour de Roland Garros contre 0 français (du jamais vu depuis la création des Internationaux de France en 1925), les Romains ont enfin vaincus les Gaulois sur leur propre terre. Mais comment expliquer une telle renaissance ?

Car oui, avec 10 Italiens dans le TOP 100 mondial (Berrettini, Sinner, Sonego, Fognini, Musetti, Travaglia, Caruso, Cecchinato, Mager, Seppi) dont 4 dans le top 30, l’Italie s’impose désormais comme une nation forte de la balle jaune. Adrianno Pannata, dernier vainqueur italien d’un Grand Chelem, à Roland Garros en 1976, peut désormais avoir l’esprit tranquille. La relève semble enfin arrivée.

Le déclic Marco Cecchinato

5 juin 2018. Voilà peut-être la date qui a acté la renaissance du tennis azzurri. Ce 5 juin 2018, Marco Cecchinato, 72ème à l’époque créé l’exploit Porte d’Auteuil, en s’imposant face au monstre serbe Novak Djokovic en quart de finale (6-3 / 7-6 / 1-6 / 7-6). Un Italien est enfin de nouveau en demi-finale de Grand Chelem.

Roland-Garros - Incroyable ! Marco Cecchinato sort Novak Djokovic en quart de finale - Eurosport
Marco Cecchinato après sa victoire sur Djokovic en 2018 à Roland Garros. Crédit Photo : Getty Images

Pour Vincenzo Martucci, journaliste à la Gazzetta dello Sport au micro du podcast Court n°1 : « Le premier qui a cassé les codes c’est quand Marco Cecchinato a fait demi-finale à Roland en écartant Djoko. Les autres joueurs italiens se sont dits que eux aussi pouvaient le faire« . Une demi-finale qui a donc permis à l’armée italienne de se mettre en marche. Un an après, le fantasque Fabio Fognini devenait fantastique en remportant pour la première fois le Masters 1000 de Monte-Carlo et en cette même année 2019, Matteo Berrettini accédait aux demi-finales de l’US Open.

Le tennis italien masculin, souvent resté dans l’ombre des belles performances des joueuses transalpines notamment Francesca Schiavone (Roland-Garros 2010) et Flavia Penneta (US Open 2015), est enfin sur le devant de la scène. En tête de cortège, les généraux romains Fabio Fognini et Matteo Berretinni mènent les troupes avec leur expérience. Mais les jeunes caporaux Lorenzo Musetti et Jannik Sinner semblent bien déterminés à devenir les leaders de ce nouvel empire.

Un système fédéral performant

Avec ses deux pépites (Musetti, Sinner), le tennis italien peut aujourd’hui nourrir de grandes ambitions pour l’avenir. Mais ces belles performances ne sont pas dues au hasard, et sont le fruit d’un travail au niveau fédéral. Depuis quelques années, la fédération italienne a mis en place une stratégie de professionnalisation pour les très jeunes joueurs. L’objectif, les accompagner le plus tôt possible au haut-niveau. Le nombre de Challengers et de tournois futurs organisés sur le sol italien est impressionnant. Des tournois qui permettent ainsi aux jeunes joueurs azzuri (grâce à la distribution de Wild-Card) d’affronter les meilleurs joueurs et de progresser bien plus vite.

Rome 1 | Overview | ATP Tour | Tennis
Tournoi Challenger de Rome. Crédit Photo : ATP Tour

Des occasions uniques pour ces derniers de s’aguerrir, de s’affronter, de faire de l’émulation sans dépenser trop d’argent. Derrière cette stratégie, la fédération italienne pousse ainsi ses jeunes à affronter des joueurs expérimentés sur les tournois futurs au lieu de les laisser poireauter sur le circuit junior où l’écart avec le monde professionnel est important. Une stratégie néanmoins adoptée ces dernières années par la Fédération Française de Tennis qui préfère laisser ses pépites s’éterniser sur le circuit junior. Mais l’Italie, sûrement plus maligne que nous, a très vite compris que gagner sur le circuit junior n’est pas gage de réussite sur le circuit professionnel. Dernier exemple en date, Geoffrey Blancaneaux, dernier Français vainqueur de Roland junior en 2016 qui pointe aujourd’hui encore à la 319ème place à l’ATP.

La paix entre la fédération italienne et les structures privées est aussi à l’origine de ce renouveau. Désormais, ces deux entités marchent ensembles pour accompagner les jeunes joueurs italiens vers les sommets. Preuve de cette réussite, Lorenzo Musetti sort tout droit de l’académie Mouratoglou et Jannik Sinner de l’académie de Ricardo Piatti, ancien entraineur de Novak Djokovic et de Richard Gasquet. Malgré cela, la fédération italienne garde toujours un œil sur ses joueurs notamment grâce à Filipo Volandri (DTN et capitaine de Coupe Davis) qui suit chaque joueur italien sur les tournois ATP. Une nouvelle façon de former les jeunes, ce que la France s’obstine de réfuter. En effet, la FFT préfère entretenir des relations conflictuelles avec ces structures privées au lieu de marcher main dans la main.

Sinner / Musetti, les futurs dieux romains

Si l’Italie reste une fan inconditionnée du ballon rond, la passion autour de la balle jaune prend peu à peu. Dernièrement, le quotidien La Stampa (l’équivalent du Monde) présentait en Une Jannik Sinner après son titre à Sofia (ATP 250). Un nouvel amour pour le tennis qui s’explique par l’arrivée de ces deux espoirs : Jannik Sinner et Lorenzo Musetti. Deux joueurs aux profils différents qui ont déjà tout des grands.

Lorenzo Musetti sur sa victoire contre Goffin : C'est la preuve que j'ai le niveau
Lorenzo Musetti après sa victoire sur David Goffin lors de ce Roland Garros 2021. Crédit Photo : Tennis World

Lorenzo Musetti a tout pour devenir une future star du tennis mondial. Belle gueule au caractère bien trempé et avec un magnifique revers à une main. Le jeune homme de 18 ans qui s’est révélé au Masters 1000 de Rome en 2020 en battant Wawrinka avec la manière, nourrit de grandes ambitions pour l’avenir. Si le jeune italien est capable de coup d’éclat, il se doit encore d’être plus régulier sur le circuit principal.

La régularité. Voici le maître mot qui au contraire de son compatriote, caractérise la pépite italienne Jannik Sinner (19 ans). Patient, le jeune homme s’affiche comme un joueur très complet capable de tenir longtemps la balle au fond de court. Impressionnant de calme et de sérénité sur le court à seulement 19 ans, Sinner fait peur. Très lucide dans les vestiaires après une défaite et très humble après une victoire, sa bonne mentalité est évidente. Avec son visage de vrai gamin, son grand sourire et ses tâches de rousseur, l’Italien a des airs de sympathique adolescent. Mais sur le court, il martyrise depuis février des joueurs bien plus experts que lui. Sans aucun doute, Jules César peut désormais dormir sur ces deux oreilles. Avec Sinner, Musetti, Berrettini et cie, l’Italie est de nouveau prête à régner sur le monde.

Eloi Thouault
Crédit Photo : Getty Images

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