Seulement six mois après la victoire de Primoz Roglic, Liège-Bastogne-Liège était déjà de retour. Plus jeune vainqueur depuis 44 ans, Tadej Pogacar a glané le premier Monument de sa carrière coiffant au sprint Julian Alaphilippe et David Gaudu.
Rarement Bernard Hinault aura autant fait parler. Pourtant, le Breton est très certainement resté sur son canapé devant la course tout l’après-midi. Mais les clins d’œil à son égard se sont multipliés durant cette 107ème édition. À 22 ans, Tadej Pogacar est le plus jeune vainqueur de Liège-Bastogne-Liège depuis la première victoire du Français en 1977 et aussi le premier tenant du titre du Tour à glaner la Doyenne depuis Hinault en 1980. Et depuis ce mythique sacre de 1980, voilà 41 ans que la légende française se cherche un successeur du côté de Liège. 41 ans, c’est aussi l’âge d’Alejandro Valverde, né cinq jours après la victoire du Français et acteur de la course aujourd’hui. Les superstitieux apprécieront.
Le contraste slovène
L’un a remporté le Tour du Pays Basque, l’autre l’UAE Tour et Tirreno-Adriatico. Avec Primoz Roglic et Tadej Pogacar, nul doute que la Slovénie compte dans ses rangs deux des coureurs les plus forts cette saison. Et ça tombe bien car les deux étaient au départ et, logiquement, favoris à la victoire. Si le coureur de la Jumbo-Visma a très vite montré ses limites, Tadej Pogacar a tout de suite indiqué qu’il était le plus en jambes. Après un premier coup de force dans la Côte de la Redoute, Ineos a de nouveau durci la course dans la Côte des Forges, à 25 kilomètres de l’arrivée par l’intermédiaire de Tao Geoghegan Hart. Alors que Primoz Roglic a préféré envoyer son lieutenant Jonas Vingegaard, Tadej Pogacar a pris ses responsabilités en revenant seul sur le Britannique.

Crédit photo : Bas Czerwinski/Getty Images
Le contraste entre un Tadej Pogacar entreprenant, toujours présent dans les bons coups, et un Primoz Roglic, en permanence au rupteur, subissant tous les mouvements de course en a saisi plus d’un. Comme une impression de déjà-vu du côté de la Planche des Belles Filles. Son équipe n’a jamais réellement pesé sur la course, à l’exception de l’épatant Jonas Vingegaard. À l’inverse, UAE s’est montré dans les moments décisifs notamment grâce à Davide Formolo et Marc Hirschi. L’équipe émiratie place d’ailleurs trois coureurs dans les 16 premières positions quand sa rivale néerlandaise ne place que son leader (13ème).

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Sixième coureur au 21ème siècle à remporter un Grand Tour et un Monument, Tadej Pogacar est reparti en 2021 sur les mêmes bases qu’en 2020. Sa victoire d’aujourd’hui ne souffre d’aucune contestation tant il a montré qu’il était meilleur aujourd’hui dans les moments décisifs. Ni le collectif d’Ineos ni ses compagnons d’échappée dans le final n’auront su réellement mettre à mal le Slovène. À ses côtés sur le podium, deux Français, une première sur la Doyenne depuis 1953. Derrière, Michael Woods et Alejandro Valverde peuvent avoir des regrets.

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Derrière Tadej Pogacar, des regrets…ou pas
Il y a des histoires d’amour qui ne se terminent jamais comme on le souhaiterait. Comme lorsque votre promise part en fin de soirée avec votre meilleur ami, Michael Woods voit s’échapper de peu chaque année une victoire à Liège. Le Canadien est d’une régularité impressionnante sur la Doyenne : 9ème en 2017, 2ème en 2018, 5ème en 2019, 7ème en 2020 et 5ème en 2021. C’est d’ailleurs lui qui lance l’offensive décisive dans la Roche aux Faucons et qui relance à 10 kilomètres de l’arrivée. À ses côtés, uniquement les plus forts puisque ses compagnons d’échappée ont tous fini dans les 10 premières positions au sommet du Mur de Huy, ce mercredi (à l’exception de Pogacar, absent pour cause de Covid).
Très fort dans les côtes, le Canadien n’avait néanmoins pas les moyens de rivaliser au sprint face à ses compères d’échappée, à l’inverse d’Alejandro Valverde. Ce dernier avait un rêve : remporter son cinquième Liège-Bastogne-Liège le jour de ses 41 ans et ainsi égaler le record d’Eddy Merckx. Le quadragénaire avait une belle occasion pour le réaliser, grâce à ses qualités au sprint. Champion du monde en 2018 en réglant un groupe de quatre, où figurait d’ailleurs Michael Woods, l’Espagnol a l’expérience de ses moments-là. Mais en lançant son sprint, vent de face à 250 mètres de l’arrivée, le coureur de la Movistar a réalisé une erreur aussi grossière qu’étonnante. Derrière, Julian Alaphilippe et Tadej Pogacar, eux aussi à l’aise dans l’exercice, ont pu déboîter pour s’adjuger les deux premières places. Alejandro Valverde signe aujourd’hui son 21ème (et dernier ?) Top 5 sur une Ardennaise, plus que nul autre coureur au 21ème siècle.

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Si la promise de Michael Woods n’a pas fini dans ses bras, elle n’a pas non plus terminé dans ceux de Julian Alaphilippe. 2ème en 2015, 4ème en 2018, 5ème en 2020 après reclassement, le Français est souvent dans les bons coups du côté de Liège. Mais cette année, la déception est bien plus mesurée. Le récent vainqueur de la Flèche Wallonne ne semblait pas être dans un grand jour. Il n’aura d’ailleurs jamais attaqué, préférant suivre ses concurrents et bénéficier du travail de Dries Devenyns et Mauri Vansevenant. À l’arrivée, « pas de regrets » pour le coureur de la Deceuninck-Quick Step qui conclut sa campagne des Ardennaises sans avoir quitté le Top 10.
Des vainqueurs attendus
Voilà la campagne des Ardennaises terminée. Elle n’aura pas surpris concernant l’identité des vainqueurs : Wout Van Aert, Julian Alaphilippe et Tadej Pogacar. Les trois étaient attendus et ont répondu présent cette semaine. Néanmoins, les scénarios ont pu étonner. Le changement de parcours de l’Amstel a conduit à un déroulé bien différent des dernières années, les choses s’étant décanté uniquement dans le dernier tour. Autour de Liège, peu auraient parié sur un coup de force aussi précoce et intense d’Ineos. L’équipe anglaise aura été de loin la plus entreprenante grâce à Tao Geoghegan Hart, Adam Yates et Richard Carapaz. Sans succès donc, car cette année ce sont les grands favoris qui gagnent. Et la normalité se fait tellement rare en ce moment que nul ne s’en plaint.