La Formule 1 et la Moto GP sont rentrés aux usines pendant l’hiver. Entre améliorations aérodynamiques, moteurs, appendices et changements de réglementations, le monde des sports mécaniques peut sembler clos. Dans « Détail technique », Les Olympistes reviendront tout au long de l’hiver sur les arcanes des sports auto-moto pour pouvoir apprécier un GP en toute tranquillité.
2014, l’année de tous les changements. Après quatre saisons dominées par Red Bull et son pilote allemand Sebastian Vettel, les règles du jeu sont modifiées. La Formule 1 inaugure une nouvelle technologie moteur : V6 Turbo Hybride, coïncidant avec l’arrivée au pouvoir de Mercedes.
Modifications des moteurs, modifications du bruit
Alonso, à Abu Dhabi, a repris le volant de la Renault R25 championne du monde en 2005. Une attraction énorme dans les paddocks en cette fin de saison. Le bruit du V10 atmosphérique est reconnaissable à plusieurs kilomètres, ravivant des souvenirs à des jeunes pilotes. Lewis Hamilton se retournera même en pleine interview pour profiter de l’instant. « That sound is just so good ». Durant la période 2000-2005, où la Formule 1 s’est révélée aux yeux du monde entier avec les sacres de Schumacher puis d’Alonso, les voitures utilisaient alors un V10 développant au maximum 900 chevaux et une cylindrée limitée à 3 000cm3 ou 3,0 litres, c’est-à-dire le volume maximal de la chambre des pistons, où ces derniers font leurs mouvements de va-et-vient.
Mais ce V10, chéri par tant de fans, n’est qu’une adaptation plus légère d’un V12 Turbo encore plus bruyant. Puis en 2006, on glisse vers un V8 : 810 chevaux maximum, 2 400 cm3 et une rotation à 19 000 tours par minute. Mais c’est réellement en 2014 que tout bascule. La Formule 1 s’engage dans une démarche plus actuelle avec l’hybride. Un bruit étouffé apparaît sur les paddocks, moins fort, moins reconnaissable, moins beau et surtout moins spectaculaire. Un son banal. La F1 est un immense laboratoire-test. Il n’est pas rare de voir des innovations techniques venues des sports auto-moto dans les engins de grande distribution. 6 ans après, tous les constructeurs produisent une gamme de moteur thermique et/ou hybride, grâce aux innovations des ingénieurs en F1. La Formule E a également joué (ex : batteries développées par McLaren) et jouera également son rôle pour l’industrie automobile électrique.
Le bruit est une partie essentielle du sport automobile mais rester dans l’ère du temps l’est encore plus. La F1 ne peut stagner dans un paradigme qui n’est plus utilisé par les personnes lambdas. La Formule 1 est et doit rester avant-gardiste !
Comment marche le moteur V6 des F1 ?
Commençons par sa fiche technique pour pouvoir le comparer aux anciens moteurs. Le moteur se décompose en six parties : un moteur V6 à combustion interne (suivant le même principe que des voitures banales), un turbocompresseur marquant son retour depuis son interdiction en 1989, une batterie, de l’électronique et deux petits nouveaux : MGU-K et MGU-H. Bien que décrié, ce moteur est un monstre de rapidité grâce aux gains de performances énormes dus au turbo et à l’énergie électrique. Certains constructeurs dépassent les 1000 chevaux, les moteurs sont limités à une cylindrée de 1 600cm3 et une rotation maximale de 15 000 tours par minute.

Sur le papier, le moteur actuel est donc moins puissant que ses prédécesseurs, pourtant il développe plus de chevaux. Avant de comprendre les causes, regardons l’intérieur du moteur V6. Des pistons, dans six gros cylindres (d’où V6), font des mouvements de va-et-vient en aspirant premièrement un mélange d’air et d’essence, puis en le comprimant tout en augmentant sa température jusqu’à l’explosion provoquée par une étincelle. Cette explosion entraîne un mouvement vertical transformé en mouvement rotatif par le vilebrequin. Il est ensuite transmis aux roues motrices. Avec ces images, on comprend mieux le principe de cylindrée. La chambre de pistons ne peut ici accueillir qu’un maximum de 1,6 litres de mélange air/essence. Plus cette capacité est importante, plus il y a de mélange à exploser, plus l’explosion et l’énergie diffusée sont importantes et donc plus la voiture avance vite.

Une fois cette explosion dans le moteur effectuée, on se retrouve avec le gaz d’échappement qui doit être évacué. C’est là que le Turbo entre en jeu. Le turbocompresseur est composé d’une turbine tournant grâce aux gaz et d’un compresseur actionné par le mouvement de la turbine. Une fois cette mission effectuée, les gaz sont libérés. Le compresseur ne se sert pas des gaz et utilise seulement le mouvement de la turbine pour aspirer de l’air, qu’il envoie dans le moteur. Plus le volume d’air arrivant dans le moteur est important, plus l’explosion l’est aussi. On en revient à la même conclusion : la voiture va plus vite. Un boost de puissance est réalisé sans toucher à la cylindrée seulement en suralimentant d’air le moteur.

Finalement, la partie moteur à essence se comprend assez facilement. Le travail des pistons est assez simple alors que tous les fans de jeu de voitures, parfois peu réaliste, reconnaîtront le principe du turbo. À cela s’ajoute deux nouveaux éléments pour la partie hybride : MGU-K et MGU-H.
MGU-H et MGU-K
L’utilisation d’un turbocompresseur s’accompagne toujours d’un laps de temps où les gaz d’échappement sont trop lents et donc où la turbine ne tourne pas assez vite. Le turbo perd alors en efficacité du fait du turbo lag. Plus la voiture monte en régime et moins les gaz sont lents. Donc pour pallier à ce manque d’efficacité, il faut toujours que la turbine tourne à une vitesse élevée permettant d’envoyer le plus d’air possible. C’est là qu’intervient le MGU-H. Celui-ci se place entre la turbine et le compresseur. La turbine actionne le MGU-H générant de l’électricité, qui est soit stockée dans une batterie pour d’éventuelles occasions de relance de course (après Safety Car ou arrêt aux stands) où le moteur tournera moins vite, soit directement utilisée pour alimenter le compresseur et apporter plus d’air. Le MGU-H permet donc d’avoir toujours la pleine capacité moteur.

« Il fait de la récupération d’énergie pour mieux sortir de la parabolique », ces mots de Julien Fébreau lors de la victoire de Gasly à Monza reste graver dans le marbre. Le KERS est un système, introduit en 2009, facultatif et lourd permettant de récupérer de l’énergie. Aujourd’hui, son successeur – le MGU-K – est obligatoire et entraîne une surpuissance moteur.
L’énergie cinétique, c’est-à-dire l’énergie que possède un corps du fait de son mouvement par rapport à un référentiel (la voiture en mouvement par rapport au sol), est utilisée ici. Lors d’un freinage, cette énergie est transformée en chaleur du fait de la friction des pinces et de la plaquette de frein. Le MGU-K utilise cette énergie lors d’un freinage et la transforme en électricité. Le moteur électrique l’utilise pour délivrer un surplus de puissance aux roues : ERS. Mais pour pouvoir mettre en place ce principe, il faut des freins électroniques et non-hydrauliques. Le système gère le freinage en fonction de la quantité d’énergie à récupérer souhaité par le pilote et la force du freinage du pilote. L’électronique, bien que révolutionnaire, peut être dévastatrice pour certaines courses (abandon Leclerc à Barcelone après un bug de freins). Gasly, à Monza, récupère donc de l’énergie pour utiliser tout le potentiel du moteur.

Depuis 2014, voilà à quoi ressemble un moteur de Formule 1. Bien évidemment, le travail des ingénieurs est colossal sur ces moteurs. Ce V6 Turbo Hybride rebute plus d’un constructeur à se lancer en Formule 1. Les marques comme Audi, Porsche ou BMW ont préféré, ces dernières années, se tourner vers la Formule électrique. Trop complexe, trop coûteux, tant d’excuses également utilisées par Honda pour casser son contrat avec Red Bull et Alpha Tauri.
Je voudrais savoir de quel V12 Turbo encore plus bruyant vous parlez il n’y a jamais eu de V12 Turbo en F1 et son bruit serait étouffé… Par contre article très bien écrit
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