Renault se maquille pour devenir Alpine F1 Team. Un changement cosmétique intenté pour se rapprocher des critères du sport automobile. Mercedes est inscrit sous le nom AMG, McLaren et Aston Martin possèdent des gammes sportives. Personne n’a envie de supporter une marque symbolisée par la Twingo. Renault sera représenté par des voitures plus sportives, plus agressives sous le nom d’Alpine.
Depuis le retour de Renault en Formule 1, Cyril Abiteboul se targuait de vouloir progresser chaque année jusqu’aux podiums. Lorsque l’on regarde les faits, l’écurie a terminé à la quatrième position en 2018, cinquième en 2019 et 2020. Une apparente stagnation cachant une réelle amélioration. En 2020, l’écurie était dans une lutte acharnée contre Racing Point et McLaren jusqu’aux derniers GP permettant aux Français de se surpasser. Trois podiums sur l’année (et un tatouage pour Abiteboul), des records de vitesse en courses confirment que le losange a bien passé un cap.
Un nouvel effectif
Pour cette saison 2021, Alpine a décidé de ne pas changer que sa cosmétique. L’écurie se réinvente en raison du départ de l’Australien Daniel Ricciardo. Le pilote emblématique de Colgate quitte le navire français pour rejoindre celui de McLaren. Un coup dur pour Alpine. Surtout que dans le même temps, une étrange mayonnaise se prépare. Les Anglais-orange ont redécouvert les joies de faire vrombir le moteur Mercedes dans leurs garages. Aston Martin compte également continuer sur sa lancée de copie conforme des Mercedes tout en se pavanant de la venue du quadruple champion du monde à Silverstone, Sebastian Vettel. Enfin Ferarri possède l’envie de revenir au premier plan. La recette nous donne un sacré morceau pour les Français dans la lutte à la troisième place. Alors oui, on ne connaît toujours pas les avancées technologiques des uns et des autres pendant l’hiver, même si les moteurs et châssis ont été gelés au 31 décembre pour toute la saison. Mais voilà, Alpine accuse déjà un retard conséquent sur ses concurrents. Cyril Abiteboul remercié, ce sera à Davide Brivio (ex-Suzuki MotoGP) de tirer son écurie vers le haut et progresser.
Pour ressortir la tête de l’eau, un seul choix : obtenir les services d’un pilote expérimenté. Toute la saison 2020, les rumeurs entre Alonso, Vettel, Hulkenberg et Pérez sont allées bon train. Alpine a décidé de renouer avec son passé en rapatriant un Fernando Alonso, toujours assoiffé de sensations fortes. Après trois années en fin de grille avec une McLaren en reconstruction (2015-2018), Alonso avait accroché sa combinaison au mur pour diversifier son palmarès et tenter la Triple Couronne. Mais l’appel de la F1 était trop fort. Après deux sacres en 2005 et 2006, et surtout beaucoup de désillusions chez Ferrari, la carrière d’un des pilotes les plus talentueux de tous les temps ne pouvait s’arrêter sur trois saisons sans marquer un seul point. Heureusement, Alpine lui offre une nouvelle fois sa chance. Son sérieux, son expérience et son expertise serviront à l’équipe. Pourtant, il doit endosser un rôle qu’il ne lui sied guère, celui de coéquipier. Alonso est un soliste chevronné, qui écrase tout sur son passage. Il n’a jamais hésité à prendre le dessus psychologique sur ses coéquipiers et en envoyer un dans le mur (Crashgate de 2008) pour gagner une course. Le vieux briscard doit avant tout se remettre à niveau mais également d’une chute à vélo en Suisse.

Aux côtés d’Alonso, on retrouve le Frenchie Esteban Ocon. Certes, le podium signé à Sakhir a sauvé sa saison passée, mais le reste n’est pas glorieux. Avec 62 points, il finit dernier de la lutte des trois écuries (Renault, McLaren et Racing Point) avec une 12ème place et est même également dépassé par Leclerc et Gasly. La comparaison avec Ricciardo (4ème au classement) est rude. Si l’on ne compte pas les abandons, le pilote normand s’est fait dominer à 10 reprises sur 13 courses. Peut-être est-ce la fruit d’une malchance en course ? Rien de plus faux car, sur les qualifications, Ocon n’a battu son coéquipier que 2 fois sur les 17 manches. Le Normand doit élever son niveau en 2021 pour ne pas être coupé par Alpine. Surtout que des rumeurs fusent déjà sur une possible venue de Gasly ou la titularisation d’une jeunesse prometteuse.
Une filière jeune prometteuse
Pour la première fois de leur histoire, le groupe Renault compte des jeunes capables de rivaliser avec les autres formations, notamment la Ferrari Driver Academy. Respectivement à la sixième et septième position au classement FIA F2, le Chinois Guan Yu Zhou et le Danois Christian Lundgaard veulent succéder à Mick Schumacher en 2021. Surtout qu’un petit nouveau les épaulera. Oscar Piastri est un diamant brut, champion du monde F3 devant Théo Pourchaire (lui aussi en F2). Il a su résister aux assauts du Français tout au long de la saison et s’imposer sur une course finale dantesque. Leur seul objectif est de prouver aux yeux du monde, que les pilotes Ferrari ne sont pas intouchables. Au classement 2020, devant les deux ex-pilotes filière Renault (devenue Alpine), seuls Shwartzman et Illot n’ont pas obtenu des baquets F1. Après une saison 2020 plus que serrée, un champion Alpine prouverait la supériorité de la filière et peut-être espérer un baquet en récompense.
L’objectif, à terme, de Renault est de titulariser des jeunes dans une Alpine F1. Mais, à l’heure où des pilotes novices arrivent dans les paddocks, où de grosses écuries font confiance à la jeunesse, l’écurie française roule à contresens. En sport automobile, il faut savoir se positionner dans l’ère du temps. Le groupe Renault, quant à lui, fait ressurgir son passé. En offrant la voiture à Fernando Alonso, l’écurie espère jouer des victoires mais broie totalement les espoirs de ses jeunes. Zhou embrayera sur sa troisième saison en F2 alors que son talent est reconnu par tous. De quoi décourager les jeunes à ne pas s’engager avec les Français. Le rêve de tout pilote jeune est d’accéder en Formule 1. L’image envoyée par Alpine est une stagnation dans l’antichambre du rêve. On peut donc questionner le choix du talent français Victor Martins d’intégrer la filière pour accéder à la F3.
Pronostics : Malheureusement pour la France, Alpine ne semble pas être dans la dynamique de progression cette année. Avec une transformation cosmétique et stratégique, l’écurie doit trouver les meilleurs ajustements. Après l’intense bataille de 2020, les Français devront voir se rapprocher dans les rétroviseurs un cheval bien décidé à rejouer des victoires. Seule écurie motorisée Renault sur la grille, Alpine pourrait sortir son épingle si un moteur efficace est de nouveau sorti de Viry-Châtillon. Attention à la sixième place et à ne pas laisser s’impatienter les jeunes.