Le rôle de Community Manager (CM) est devenu considérable dans la communication et l’attractivité des clubs. Depuis quelques années et la démocratisation des réseaux sociaux, les « CM » sont de véritables personnalités. Vision du métier, parcours, réseaux sociaux et buzz : rencontre avec quatre d’entre eux.
« Je ne me qualifie pas du tout de Community Manager » lâche Anthony Boyer, CM du Puy Foot Auvergne (N2). « Je suis social media manager et j’assiste également sur les relations presses » assure Florent Crouzet, CM de l’Union Bordeaux-Bègles. « Ma fonction principale est d’animer les réseaux sociaux du club » convient Maxime Malovry de Chambly (Ligue 2). « CM, ce n’est qu’une partie de mon métier » avoue Corentin Vincent du Saran Loiret Handball (Proligue).
Les CM interrogés ont tous une vision bien singulière de leur métier. Le professionnalisme du club dans lequel ils évoluent peut avoir un impact, mais pas que. Pour Maxime, « beaucoup pensent qu’être CM c’est appuyer sur publier et basta. C’est faux ! ». « J’anime les réseaux sociaux mais je les alimente surtout. J’ai des fonctions à la fois administratives et organisationnelles. Je me définis plus comme un chargé de communication. » détaille Anthony. Un métier devenu au fil des années, multi-tâches.
Florent partage cet avis, lui qui estime que sa polyvalence lui a été essentielle au moment de devenir CM : « J’ai toujours été attiré par la communication, les réseaux sociaux. Je voulais m’orienter vers le graphisme et en cherchant une alternance j’ai eu une opportunité avec l’UBB ». Bien souvent, les futurs CM ont eu des parcours atypiques avant de s’installer dans leur rôle. Maxime avoue être devenu CM « un peu par hasard ». Celui qui est réputé pour son humour sur Twitter raconte avoir commencé par quelques lives-tweets avant d’obtenir un poste à plein temps. Les clubs n’accordaient auparavant que peu de crédit au CM. La donne change depuis plusieurs années.

Nos témoins sont unanimes : devenir community manager n’était pas une vocation. « On me l’a proposé dans un club, mon premier, en 2015. Et puis j’ai franchis le pas. », se rappelle Anthony. « Cela coïncidait avec la fin de mes études. Je n’ai pas hésité une seule seconde. » lance Maxime. Chacun insiste néanmoins sur la passion qui les a poussé à s’investir pour leur club. « Dès que l’on travaille dans un club, on en devient plus ou moins supporter. C’est difficile de ne pas s’y attacher. » analyse Florent.
L’on pourrait imaginer qu’un passé de journaliste est profitable, dans ce qu’il apporte de la connaissance du terrain et des qualités d’écriture. Cela se vérifie pour Corentin : « J’ai été journaliste radio pendant 4 ans, sur une radio orléanaise puis nantaise. J’ai décidé de reprendre mes études en BTS communication en alternance au sein du Saran Loiret Handball. Je commentais les matchs de Saran à la radio, j’étais donc très proche du club. J’ai ensuite proposé mon projet et j’ai été embauché en alternance puis en CDI au sein du club depuis l’été dernier » détaille celui qui gère une communauté totale de 16.000 fans du Saran Loiret Handball. « Avant, j’étais journaliste sportif, mais j’avais l’idée de travailler dans foot. Avec mes réseaux j’ai pu intégrer des clubs. Le Puy, c’est mon troisième. » reprend Anthony.
Une question d’opportunités à saisir, donc. Les réseaux sociaux ont, eux, bouleversé le sens du métier. « Je pensais que le métier de CM était voué à disparaître, mais l’apparition de nouveau réseaux sociaux depuis 4-5 ans demande plus de temps et la présence d’une personne dédiée et qualifiée » confie le CM de l’UBB. « Mais il y a beaucoup de dérives en règle générale sur les réseaux sociaux, rebondit Anthony. Personnellement il a fallu que je m’acclimate à cette nouvelle génération, à ces réseaux sociaux. J’ai 50 ans, je ne suis pas de cette génération. » Outre les réseaux sociaux traditionnels pour les équipes sportives (Facebook, Twitter et Instagram), pour lesquels nos quatre intervenants s’accordent à dire qu’il est vital d’adapter le contenu au réseau utilisé afin de capter une audience la plus large possible, de nouvelles plateformes émergent.

« Tiktok révolutionne un peu tout. On avait l’habitude de décliner un même contenu pour tous les réseaux sociaux. Là ce n’est pas possible, mais Tiktok est un réseau d’avenir. Pour l’UBB, c’est une cible très intéressante car c’est un public jeune » avance Florent.
Corentin résume la pensée générale sur le rôle nouveau des CM : « Avant, nous n’étions peut-être que des relayeurs d’infos, maintenant nous sommes des producteurs de contenus et ça c’est très intéressant. Je nous vois comme des streamers, des YouTubers. On doit fidéliser la communauté, proposer du nouveau contenu. On doit tout faire pour mettre en lumière le club et montrer son meilleur visage afin de remplir la salle, faire venir de nouveaux fans et partenaires ». Même si il est difficile de mesurer l’impact réel des publications au delà des chiffres, elles ont le mérite de faire parler des clubs à grande échelle.
« On nous confond avec le Puy du Fou »
Mais qui dit CM dit aussi trashtalk. Corentin y est rodé. Avec son homologue de Limoges, ils se sont longtemps charriés par tweets interposés, avec succès. « Dans le story telling, on a réussi à créer une rivalité saine, ou pas, ça dépend des fois. Parfois on s’embrouille un peu, on se met des piques à base de mêmes. Maintenant on est potes, je lui ai même vendu ma voiture cet été (rires) » raconte celui pour qui il est « vital de se démarquer ». Maxime, véritable trublion de Twitter où il y fait régulièrement le buzz, ne le contredira pas. « On a [à Chambly] un capital sympathie énorme. Même en étant dernier du classement, on reçoit des messages de soutien tous les jours ! »

« Pour moi il y a deux notions de CM. Celle attachée aux grands clubs, qui sont de grandes entreprises. Là, les CM ont un contenu assez fort qui permet d’être basique. Et puis il y a nous, pour qui c’est vital de se démarquer. » , Corentin VINCENT
La relation au buzz, Florent l’entretient régulièrement. Et pour cause il compte Nans Ducuing parmi ses plus fidèles créateurs de contenu. L’arrière fantasque de l’UBB « a cette force de fédérer autour de lui. Pour l’anecdote, le deuxième prénom du fils de Semi Radradra (ancien joueur au club) c’est Nans, en rapport à Nans Ducuing. Forcément, les différents buzz qu’il a provoqués nous ont été profitables.»
« Quand on a fait signer Alexis Bosetti cet été, ça a été un coup à 100.000 vues. C’est énorme, reprend Anthony avant d’enchaîner sur tout autre chose. Beaucoup de gens croient qu’on est le club du Puy du Fou, en Vendée. Alors que ça n’a rien à voir, nous, on est en Haute Loire. C’est un déficit de notoriété. On nous confond souvent avec le Puy du Fou. »

Pour nos quatre témoins, l’aspect humain sera à l’avenir déterminant dans l’interaction avec la communauté. « Ce métier peut prétendre à de belles évolutions » conclut Corentin.