Cyclisme

Milan-San Remo : Peter le maudit

À l’instar de George Hincapie, 7 fois dans le Top 10 de Paris-Roubaix sans avoir jamais remporté l’Enfer du Nord, Peter Sagan a toujours tourné autour d’un succès sur Milan-San Remo. Déjà lauréat du Tour des Flandres et de Paris-Roubaix, le coureur de 30 ans doit faire vite s’il veut ajouter un troisième Monument à son palmarès. Et cette année, le Slovaque ne fait pas partie des grands favoris…

Toujours bien placé

Ce n’est un secret pour personne, Peter Sagan a un des plus beaux palmarès de la planète cyclisme au 21ème siècle. Vainqueur de 2 Monuments (le Tour des Flandres en 2016 et Paris-Roubaix en 2018), le Slovaque est un acteur incontournable de toutes les courses auxquelles il prend part, et ce depuis de nombreuses saisons. Mais le coureur de la Bora collectionne aussi les accessits à la pelle. Cela en devenait presque maladif comme sur le Tour 2015 durant lequel l’ex-coureur de la Tinkoff-Saxo avait terminé à 12 reprises dans le Top 10 sans remporter la moindre étape.

Et ses résultats sur la Grande Boucle sont révélateurs des performances du triple champion du Monde. Vainqueur de 12 étapes en 8 participations, Peter Sagan est d’une régularité hors norme, multipliant les places d’honneur. Le coureur de 30 ans a terminé à 71 reprises dans le Top 10 d’une étape sur les 150 étapes auxquelles il a pris le départ. La critique est sûrement dure mais le septuple lauréat du maillot vert ne lève que très peu les bras au prorata de sa présence dans le Top 10.

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Ce « déficit » de victoires n’est pas propre à la Grande Boucle. Sur Milan-San Remo, Peter Sagan a terminé à 7 reprises dans les dix premiers en 9 participations. Résultat ? Aucune victoire et beaucoup de regrets comme en 2013. L’ex-coureur de la Cannondale avait fait le job pour s’extirper avec un groupe d’outsiders mais le très surprenant Gerard Ciolek l’avait sauté sur la ligne.

« Les résultats ne sont pas importants, ce qui compte c’est de faire le spectacle »

Bis repetita en 2017. Dans le mythique Poggio, le triple champion du Monde fait le taff pour s’extirper du peloton mais est suivi par Julian Alaphilippe et Michal Kwiatkowski. Problème, le natif de Zilina fait tout le boulot pour éviter le retour du peloton. Cela fait le jeu de Kwiato qui coiffa le champion du Monde sur le fil. Ce dernier semblait alors s’en moquer quelque peu à l’arrivée : « Les résultats ne sont pas importants, ce qui compte c’est de faire le spectacle. Si je gagne comme Kwiatkowski, je ne suis pas content ».

Du pur Sagan dans le texte : perdant sur la ligne, gagnant dans le cœur des fans. D’ailleurs, le principal concerné ici ne semble pas perturbé à l’idée de n’avoir jamais levé les bras à San Remo : « Milan-San Remo est une course spéciale. Vous devez peut-être attendre pour la gagner. Peut-être que ce n’est pas cette année, alors vous devez essayer l’année prochaine, et si ce n’est pas l’année prochaine… C’est comme les Mondiaux, tu dois attendre pour ton année. »

Un sprint tendu comme un string. Crédit : Sirotti

Le vainqueur de Paris-Roubaix 2018 n’est pas forcément un pur sprinteur à l’instar d’Arnaud Démare, John Degenkolb et Alexander Kristoff, vainqueurs ces dernières saisons. En cas de sprint massif, le Slovaque risque de jouer perdant face à des coureurs de cet acabit. Très bon descendeur, c’est sûrement avec une attaque dans le Poggio puis une descente seul en tête que le coureur de 30 ans a le plus de chances de s’imposer. Même s’il n’est pas un très bon rouleur, le coureur de la Bora-Hansgrohe est largement capable de résister au retour du peloton. Vincenzo Nibali a prouvé en 2018 qu’une très bonne descente du Poggio pouvait suffire pour l’emporter.

Les qualités de descente de Peter Sagan seront un atout de taille dans le final de Milan-San Remo.
Crédit photo : Panoramic

Tout le temps présent dans l’emballage final, le coureur de la Bora-Hansgrohe n’a aucun mal à passer le Poggio avec les meilleurs. Car c’est dans cette petite bosse (3,6 kilomètres à 3,8%) que se joue le final de la Primavera. Situé à 5 kilomètres de l’arrivée, les équipes de sprinteurs y font le forcing pour protéger leurs leaders et éviter les attaques des puncheurs. Et Peter Sagan possède des qualités de vitesse indéniables couplées d’une forte explosivité.

Cette dernière qualité lui vient sans aucun doute de sa jeunesse lorsque le Slovaque s’illustrait en cyclo-cross et en VTT. Il est d’ailleurs intéressant de noter que Julian Alaphilippe (tenant du titre et troisième en 2017) et Michal Kwiatkowski (vainqueur en 2017) sont aussi passés par au moins l’une de ces deux épreuves. Ces deux derniers ont fait parler ces qualités-là pour accrocher le Monument italien à leur palmarès.

Wout Van Aert grand favori

Alors oui, quand Peter Sagan est au départ d’une course, il fait évidemment partie des favoris. Mais cette saison, les cartes sont totalement rebattues. Tout d’abord car la course a lieu au mois d’août dans un contexte très particulier. L’ensemble des favoris n’ont qu’entre un et cinq jours de courses dans les jambes. La course est très longue (près de 300 kilomètres) et certains risquent de payer cher en fin de course ce manque de rythme. D’autant plus que les équipes ne pourront compter plus que sur 6 coureurs au lieu des 7 habituels. Le changement de parcours, dû à la pandémie, ne devrait par contre influer que très peu la physionomie de la course.

En tête de gondole des concurrents de Peter Sagan, on retrouve Wout Van Aert. Vainqueur des Strade Bianche la semaine dernière, le Belge est en très grande forme. Même si on peut légitimement douter de sa capacité à être présent dans le final – formation de cyclo-crossman oblige – sa 6ème place la saison dernière rappelle qu’il peut prétendre à la victoire.

Wout Van Aert a mis Sienne à ses pieds la semaine dernière et se présente en favori au départ de Milan.
Crédit photo : Kramon

Il faudra aussi compter sur Philippe Gilbert, qui espère remporter le dernier Monument qui manque à son palmarès, histoire d’entrer un peu plus dans l’Histoire. Le coureur de la Lotto Soudal a les qualités pour s’imposer mais Milan-San Remo n’a jamais réellement souri au Wallon. Deux fois troisième, il y a presque 10 ans, celui qui prendra sa retraite en 2022 a souvent joué de malchances sur le chemin vers San Remo entre chutes et mauvais placements. Vincenzo Nibali et Arnaud Démare, respectivement vainqueurs en 2018 et 2016, seront également à surveiller tout comme Greg Van Avermaet et Oliver Naesen. Voilà 20 ans qu’un Belge n’a pas remporté la Primavera. Cette saison, ils auront de sérieux arguments pour corriger cela. À Peter Sagan de faire durer cette disette…

Crédit photo : POOL Getty Images/Bettini
Matthieu Heyman

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