On était tellement heureux de voir la NBA faire son come-back, pas vrai ? Mais, qu’on se le dise, l’attente est encore longue avant la sortie en salle du dénouement de cette 71ème saison. Alors, plutôt que de regarder ou reregarder The Last Dance dans l’espoir que les jours passent plus vite, on a trouvé le remède à votre impatience. Aujourd’hui, rien que pour vous, nos âmes de réalisateurs vous dévoilent, en avant-première, l’autre scénario made in USA de cet été : la WNBA (Women National Basketball Association).
Date de sortie : 25 juillet 2020.
Synopsis : « Moins de spectacle, plus d’engagements sociaux. L’intrigue sous-médiatisée d’une ligue en manque d’identité, en quête de renouveau aussi. »
Avis : Excellente série si vous êtes un spectateur apte à éviter toute stigmatisation sur le physique ou toute comparaison inutile avec les stats NBA, et capable d’apprécier le basketball moins offensif, sans excentricité.

1 endroit, 1 saison
25 juillet : reprise de la WNBA. Probablement pas inscrit dans votre liste des « trucs » à absolument regarder cet été. Pourtant, l’intrigue est déjà dans l’Histoire. Dans un format aux allures de grand tournoi, les 12 franchises se sont réunies il y a quelques jours à l’Académie de l’IMG à Bradenton (Floride). Une bubble dans laquelle les joueuses sont désormais confinées pour la totalité de leur saison régulière, censée se dérouler de mai à octobre. 22 matchs plutôt que 36 et des playoffs « normaux » compléteront l’épilogue de notre saison.
Notre histoire, c’est aussi celle de protagonistes engagées. Dans un contexte social tendu par les violences policières aux Etats Unis, cette saison suivra le mouvement Black Lives Matter. Grâce au travail d’équipe mené par la Ligue et le syndicat des joueuses, une plateforme et un conseil de justice sociale ont été mis en place pour discuter racisme, droits des femmes et des LGBTQ. L’ensemble des équipes s’échauffera aussi avec un tee-shirt sur lequel sera inscrit le nom des différentes femmes et jeunes filles victimes de violences policières.
Il manque pourtant une pièce au puzzle de la reprise. Flash-back sur le 17 avril dernier. C’est dans son canapé que la pick 1 of the draft, Sabrina Ionescu, a appris sa sélection par New York Liberty. La jeune fille est un personnage : meilleure joueuse universitaire la saison dernière, elle est aussi la première à avoir atteint la barre des 2000 pts, 1000 rebonds et 1000 assists en NCAA. Et comme cette saison (comme cette année) n’en finit plus d’être spéciale, G. Bryant, A. Altobelli et P. Chester, décédées dans l’accident d’hélicoptère qui a coûté la vie au Black Mamba, avaient été draftées symboliquement.
Exposition et médiatisation : la difficile intégration
Voilà notre intrigue ficelée. Pour la comprendre pleinement, il faut remonter le temps. Comprendre pourquoi la WNBA rame dans l’arène médiatique et internationale. En 1996, date de sa création, l’ambition est claire : promouvoir le basket féminin au travers d’un championnat, le meilleur du monde. La réalité est plus complexe. Entièrement détenue par la NBA au départ, elle s’exonère petit à petit de sa tutelle. Aujourd’hui, les deux ligues n’ont plus grand chose d’autre en commun que les trois dernières lettres d’un sigle, et c’est tout. Selon les anciens propos d’Isiah Thomas, la WNBA était « en rupture », une chose positive puisqu’elle n’a pas à gérer certaines controverses liées à l’argent ou « la surexposition ».
Sauf qu’à défaut d’être surexposé, il faudrait déjà être mieux exposé. Il n’y a que 12 franchises. Résultat : des pans entiers du territoire américain ne sont pas concernés par une équipe. Les contrats avec ESPN et ABC sont de bonne augure, même si tout est loin d’être acquis en terme de visibilité. La superposition du championnat avec la NBA cet été, est-ce deux fois plus de basket à regarder ou deux fois plus de chances d’être occulté ? Auquel cas, la WNBA doit-elle s’appuyer sur le phénomène NBA pour faire grimper son audience ou trouver son propre public ? Le débat est ouvert.

Le basket féminin en manque d’identité
La grande histoire du basket féminin, c’est celle d’un sport en manque cruel d’identité. Aujourd’hui, vous n’avez pas besoin d’être un fin connaisseur de basketball, pour savoir que Michael Jordan était une icône NBA. Mais, posez-vous la question ; est-ce que vous connaissez une icône WNBA ? Silence radio. Loin d’être un reproche, cette courte expérience est révélatrice d’un championnat qui nécessite qu’on s’y intéresse pour savoir. Une culture qui ne s’est pas encore exportée et c’est normal, c’est une ligue très récente. On l’attend toujours ce visage, celui qu’on pourra mettre sur les affiches, celui qui attirera les foules et fera briller les yeux des jeunes basketteuses.
Internationalisation n’est peut-être pas pour aujourd’hui. À vrai dire, il n’y a vraiment que quelques années que la NBA fait la part belle aux Européens, aux étrangers. En WNBA, la majorité des effectifs sont issus des universités du pays. Les Européennes sont rares, quoique l’année dernière, la belge Emma Meesseman a montré le chemin en étant élue MVP des Finales avec les Mystics de Washington. Côté français, elles sont quelques unes à avoir tenté l’expérience outre-Atlantique, avec plus ou moins de réussite. Seule actrice tricolore de cette saison, Bria Hartley, qui a signé en free agent à Phoenix.

La WNBA, championnat qui s’engage
En WNBA, chaque saison est une bataille pour plus d’humanité. Témoignage de cet engagement, chaque année, l’athlète qui s’est le plus impliquée dans le programme WNBA Cares, est récompensée. Une image qu’elle peut se féliciter de prôner. Ainsi, ce n’est pas anodin si certaines joueuses comme Natasha Cloud (Mystics), ne disputeront pas cette saison. Tout comme d’autres athlètes, elle a décidé de laisser sa place à l’écran. Une façon de mieux s’engager dans les luttes sociales.
La fameuse inspiration, celle qui nous pousse à réfléchir au sujet, on l’a puisé dans un phénomène très basique, peut-être un peu cliché, sinon véridique. L’égalité salariale…difficile de passer à côté en WNBA. En 2018, Skylar Diggins n’a pas fait dans le détail. Elle avait notamment déclaré qu’en NBA, « les joueurs reçoivent près de 50% des revenus. Pour les femmes, on est autour des 20%. Nous ne sommes même pas payées le même pourcentage des revenus que l’on génère, c’est du grand n’importe quoi. » Adieu l’égalité, bonjour l’injustice.

Très loin de générer les mêmes revenus qu’en NBA, il parait très compliqué d’avoir pour ambition de gagner la même somme. Mais, ces salaires trop bas incitent les joueuses à partir jouer l’intersaison à l’étranger. Risques de blessures garantis. En janvier, la Ligue a consenti à fixer le montant maximal du salaire à 215 000 dollars par an, au lieu de 117 500. Du même coup, le salary cap fait un bond. Et les joueuses vont être rémunérées à 100% cette saison. Les efforts payent enfin… Bémol : en arrivant en Floride, les conditions d’hébergement et d’alimentation des joueuses sont déplorables. Flot de critiques sur la WNBA. Encore une fois, le Team Disney est mieux logé.
Dommage, on tenait presque le happy ending.